Le béton est le matériel fabriqué par l’humain avec la plus grande présence sur la planète Terre, 40 tonnes pour chaque être humain vivant sur la planète. Pour savoir pourquoi, il est important de reculer en arrière et d’étudier l’histoire de son usage, depuis le début de la civilisation jusqu’à aujourd’hui, pour connaître les personnages principaux et ce qu’ils ont accompli.[1]
Pour remonter jusqu’à l’invention du béton, il faut retracer l’histoire du Calcaire, l’un des ingrédients principaux du Béton. Il est possible de faire un béton rudimentaire en écrasant le calcaire, le chauffant à très haute température et ensuite en le mélangeant avec de l’eau. Après l’avoir laissé reposer pendant une journée, voilà, de la roche créée par l’humain.
Il y 11 600 ans, en Turquie, dans deux colonies appelées Nevali Çori et Gobekli Tepe, un peuplement Néolithique construit de jolis piliers en forme de T. Des archéologistes Allemands, de l’Université de Heidelberg, ont fait la découverte, dans les années 80, que ce peuple, avait pour la première fois de l’histoire, découvert les propriétés chimiques du calcaire.[2] La découverte de ses propriétés, qui permettent d’édifier des structures en roche, a été un facteur majeur de l’âge de Pierre qui suivi et lancé une évolution technologique.
Dans un passé plus rapproché, en Égypte, plusieurs scientifiques[3] sont maintenant convaincu qu’une forme primitive de béton aurait été utilisé pour la construction des grandes Pyramides. La majorité des blocs qui ont été utilisé dans l’érection de ses structures sont constitué de calcaire aussi, il aurait été beaucoup plus facile pour les Égyptiens de déplacer de petites quantités de béton au lieu de gigantesques roches.
Sur l’ile de Rhodes en Grèce, aux environs de 700 AEC, a été découvert une des premières utilisations de mortier hydraulique de calcaire, une citerne a été construit avec ce mortier mais, sans utiliser d’agrégats. Ensuite, le développement de la civilisation romaine s’accompagna d’une grande utilisation de béton. Une des plus anciennes références au mortier romain est apparu dans un livre écrit par l’architecte Marcus Vitruvius Pollier, De Architectura. A ce moment, le béton était de plus en plus utilisé par les Romains pour supporter la croissance de leur empire. Un des plus grands ouvrages réalisés avec ce matériel par les Romains fut la construction du port de Caesarea. Complété aux alentours de 10 AEC, ce gigantesque projet aurait nécessité la construction d’un four industriel pour préparer tout le calcaire. Ce projet aurait été une expérience unique pour les Romains et ils ont raffinés leurs techniques dans leurs projets de port subséquent.
L’un des projets de béton les plus marquants de l’âge Romain est sans doute le Panthéon complété en l’an 125 EC. Le dôme, en particulier, est toujours le plus grand dôme de béton construit sans acier d’armature dans le monde. Le coffrage utilisé pour le crée aurait été le plus grand coffrage construit jusqu’à l’époque contemporaine. Un élément essentiel de la construction en béton romain était une bonne compaction pour remplir tous les interstices du coffrage et augmentant la durabilité du béton.
Une autre construction Romaine, le sénat Curia Julia construit en 40 AEC est une des rares structures de béton romain encore en existence.[4]
Autrement, en Méso-Amérique, il y a eu un peu de calcaire utilisé pour construire des poutres mais, très rarement et loin de l’usage extensif que les Romains en ont fait. Aussi, pendant la Renaissance Française, un frère Franciscain, Fra Giovanni Giocondo, étudia le livre de Vitruvius et publia son propre livre, De Architectura, une version annotée et richement illustrée de Marcus Vitruvius Pollier. De plus, ce même frère, utilisa son savoir pour participer à la construction du pont Notre-Dame à Paris.
Alors si l’utilisation du béton a disparu pendant des centaines d’années, comment est-ce que le béton moderne est réapparu? Des marchands Hollandais, en Allemagne, ont découvert la trass, l’ont broyé et ajouté a un mortier pour le renforcir. Un livre écrit par l’ingénieur Français Bernard Forest en 1748 fait mention de mortier hydraulique mais, l’idée n’est pas très populaire à l’époque.[5]
Quelques années plus tard, un ingénieur Britannique, John Smeaton, adepte de construction et mécanique, redécouvrira les propriétés et compositions du mortier hydraulique. Il construit plusieurs bâtiments importants durant sa carrière, dont le phare Eddystone. Il utilisa le mortier hydraulique pour la construction de ce phare et sa découverte changera le monde. Encore aujourd’hui cette structure de blocs de granit avec joints en queues d’arondes et calcaire hydraulique tient debout, dans un nouvel emplacement après que sa base eut été miné.[6]
Un autre Anglais, James Parker, obtiendra deux brevets en 1791 et 1796. Son second brevet couvre le ciment romain. Il vendra ses brevets à Samuel et Charles Wyatt qui développeront l’industrie du ciment Britannique au début des années 1800.[7] Le 21 Octobre 1824, un maçon nommé Joseph Aspdin, après avoir conduit de multiples expériences sur les proportions du produit, obtenu un brevet, le BP 5022, pour un ciment Portland, qui deviendra le standard dans l’industrie. Continuant le développement de ce matériel, les Britanniques se lancèrent dans la construction du Tunnel de Thames avec l’ingénieur Marc Isambar Brunet, qui inventa une première version d’un tunnelier. Après 18 ans dures années et une quantité énorme de ciment hydraulique, le Tunnel de Thames ouvra ses portes au public le 25 Mars 1843. Cela a été le premier tunnel construit sous une voie navigable.
Non seulement les Britanniques utilisaient ce nouveau matériel pour leurs constructions, mais aussi les Allemands, notamment Hermann Bleibtreu, dans la ville de Stettin, qui a mis en opération une usine d’une capacité annuelle de 25 000 barils de ciment Portland en 1855. Le ciment Allemand était alors reconnu comme étant de première qualité. L’arrivée de compétiteurs internationaux entraina l’industrie Britannique dans une vague de consolidation qui laissa derrière elle quelques compagnies majeures membres de l’Association des Manufacturiers de Ciment Portland.
Même si dans les années 1880 il y avait déjà beaucoup de structures fabriquées de béton, elles étaient encore considérées comme des nouveautés. Un élément manquait encore pour propulser le béton au premier rang des matériaux de construction, l’acier d’armature. Quelques pionniers Français travaillaient à son développement, notamment Jean-Louis Lambot, qui construit un bateau à rame, en béton, renforcit avec des barres et du filet de fer. Puis vint l’Américain Ernest Ransome, un pionnier de la construction de béton en Amérique. Il a obtenu un brevet en 1880 pour un joint d’expansion. Suivi, en 1884, du Ransome System, ce design particulier sera utilisé dans la construction en béton armé dans les 30 années qui suivront. Un détail important de son brevet est l’utilisation de fer tordu. À cette époque la majorité des professionnels croyaient que torde le fer réduisait sa capacité de traction mais, au contraire, le tordre le rendait plus solide et créait un fort joint avec le béton.
Lentement, années après années, le béton armé gagnait de plus en plus d’adeptes. Un événement majeur démontra sa supériorité par rapport aux autres matériaux, la construction du premier gratte-ciel de béton. En 1901, la construction de la tour Ingalls sera lancé, ce bâtiment deviendra le plus grand gratte-ciel de béton, du haut de ses 54 mètres et 16 étages. À ce moment, il était 2 fois plus haut que toutes autres constructions de béton armé et fera les gros titres partout dans le monde.[8]
Gagnant confiance dans les capacités de ce nouveau matériel, les architectes commencèrent à explorer les nouveaux types de construction possible avec le béton. Frank Lloyd Wright était un pionnier dans ce domaine. Il est reconnu pour la construction de l’Unity Temple en 1908 et l’hôtel impérial de Tokyo en 1923, conçu pour résister à un tremblement de terre majeur. Il poussa son inspiration encore plus loin avec la réalisation du siège social de Johnson Wax en 1939 et pour finir, le musée de Guggenheim en 1959.[9]
Pour finir, l’une des constructions de béton les plus célèbres dans le monde, la magnifique Opéra de Sydney en Australie. L’histoire de sa construction semée d’embûches, commencé en 1959 et terminé en 1973, est l’objet de plusieurs livres. Malgré tout, ce bâtiment est aujourd’hui une merveille mondiale et une fierté pour tous les Australiens.[10]
[1] Plusieurs données historiques sont basées sur le livre de Robert Courland, Concrete Planet. [2] https://en.wikipedia.org/wiki/Neval%C4%B1_%C3%87ori [3] https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_sur_la_construction_des_pyramides_%C3%A9gyptiennes_%C3%A0_base_de_pierres_moul%C3%A9es [4] https://www.livius.org/articles/place/rome/rome-photos/rome-forum-romanum/curia-julia/ [5] https://www.jnorman.com/pages/books/38462/bernard-forest-de-belidor/architecture-hydraulique-edited-by-c-l-navier-4-vols [6] https://www.britannica.com/topic/Eddystone-Lighthouse-Eddystone-Rocks-English-Channel [7] https://en.wikipedia.org/wiki/James_Parker_(cement_maker) [8] https://www.asce.org/project/ingalls-building/ [9] https://franklloydwright.org/ [10] https://www.sydneyoperahouse.com/